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les élèves de Mazarin disparaissent, la splendeur du grand roi s’éteint-elle. Une fois Louvois, Colbert et de Lyonne, les secrétaires du cardinal, formés à son école, morts ou tués, la diplomatie française, alors la première de l’Europe, perd du terrain ; et la corruption anglaise commence son travail, pour ne plus s’arrêter.

Évidemment, le pouvoir devra, dans un temps donné, pour rendre à la France sa supériorité, reconquérir l’absolutisme qui lui est nécessaire par ce que nous appelons la légalité : mais alors le pouvoir royal dépassera peut-être le but en acquérant une force despotique inouïe. La rébellion est aujourd’hui si bien prévue, qu’on bâtit au moment où nous écrivons une ceinture de forts et de feux pour pouvoir, au besoin, recommencer à la fois Catherine et Robespierre.

On oublia seulement que la puissance des idées, tant que l’imprimerie existera, domine celle des canons. L’écritoire, aidée par le temps, est plus forte que l’épée[1]. Léon X, l’œuvre de Philippe II et de son duc d’Albe, les Guises, Catherine, la monarchie de Louis XIV, l’empire de Napoléon, tous ces colosses ont succombé devant de petits volumes. Et peut-être est-ce un petit livre qui tuera l’Angleterre. Aussi la sagesse dans l’exercice du pouvoir absolu est-elle la seule force à opposer aux idées. N’est-ce donc pas déjà se défier de soi-même que de prévoir la révolte ?

Avant l’époque où le Martyr calviniste prend Catherine de Médicis, sa vie est assez intéressante pour que nous en présentions ici une esquisse où nous combattrons, comme nous venons de l’essayer, quelques opinions erronées sur elle, sur les personnages qui l’entouraient et sur les choses de son temps.

Ce précis, nécessaire et fait au point de vue d’une critique impartiale, permettra d’embrasser le cours presque entier de cette vie royale, car il se mariera parfaitement aux deux premières Études qui la peignent dans les deux grandes situations de sa politique.

En 1846, les trois parties entrèrent sous le titre général de : Sur Catherine de Médicis, et la première gardant son titre de : le Martyr calviniste, dans le tome II de la cinquième édition des Études philosophiques (première édition de la Comédie humaine, tome XV). Balzac avait emprunté l’idée de cet ouvrage au Tumulte d’Amboise par M. Germeau.

La deuxième partie parut pour la première fois, datée comme aujourd’hui, dans la Chronique de Paris des 4, 11, 18 décembre 1836, et 22 janvier 1837, sous le titre de : le Secret des Ruggieri ; elle était divisée alors en trois chapitres :

1. Une nuit de Charles IX.
2. Marie Touchet.
3. Fin contre fin.

et elle parut pour la première fois en volume en 1837, sans changement, sauf le titre du troisième chapitre supprimé, dans la quatrième

  1. Les empires qui jadis commençaient par l’épée, finissaient par l’écritoire ; nous en sommes à l’écritoire.(Médecin de campagne.)