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— Eh ! ma chère amie, dit le vieux gentilhomme, ce n’est pas du premier que je lui vois ; comme on a fait les enfants, on les a ; je te disais bien d’autre fois, que tu les gâtais trope.

— Vous ne restez pas à dîner avec nous ? demanda madame de l’Estorade à Sallenauve et à Bricheteau, en les voyant se lever pour prendre congé.

— Non, un autre jour, dit Sallenauve, quand le baromètre sera plus au beau.

— Au moins, dit la comtesse, qui le reconduisit jusqu’à la porte de la pièce où s’était passée la scène, on ne sera plus cette fois des années sans avoir de vos nouvelles.

— À bientôt ! répondit Sallenauve en lui baisant la main qu’elle lui avait tendue ; elle en fit ensuite autant pour Bricheteau, auquel elle dit de sa voix la plus câline :

— Vous n’en voulez pas à Armand, n’est-ce pas ? Son cœur est meilleur que sa tête.

— C’est ce que nous verrons, répondit Bricheteau ; moi, je ne lui en veux pas, je lui ai dit son fait.


VII

L’HOMME PROPOSE


En quittant madame de l’Estorade. Jacques Bricheteau et Sallenauve retournèrent à Ville-d’Avray pour y dîner. Pendant le trajet, leur conversation fut largement défrayée par les commentaires que comportait l’assez triste tableau d’intérieur dont ils venaient d’être témoins. Au chalet, ils étaient attendus par une autre émotion.

Venue pendant l’absence de l’organiste, une lettre lui fut remise à son arrivée ; elle était de M. Saint-Estève.

« Il voyait bien, disait ce malheureux, que jamais monsieur de Sallenauve ne le recevrait en grâce, et il n’insistait plus pour obtenir la faveur d’une entrevue. L’affectation qu’on avait mise à ne lui point faire savoir la cérémo-