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TROISIÈME PARTIE



I

NE SAIT QUAND REVIENDRA


Les correspondances avec les pays lointains, outre l’agrément de vous apporter des nouvelles vieilles de plusieurs mois de date, ont encore celui d’être capricieuses et irrégulières. Ainsi, ce fut presque à la même époque que parvinrent à Sallenauve les deux lettres écrites à plus d’un trimestre de distance et lui annonçant, l’une, la mort de M. de l’Estorade ; l’autre, le succès de la contremine préparée par Vautrin.

À ces deux lettres il fit une seule et même réponse, datée du mois de février 1842 et qui a sa place ici :

« Pauvre M. de l’Estorade, écrivait-il, quelle rapide et quelle douloureuse fin ! Vous avez raison, cher Bricheteau, c’est quelque chose d’étrange que ce mal imprévu venant en quelque sorte couper l’herbe sous le pied à la vieille maladie dont on devait mourir et qui la met ainsi hors de service. Après cela, cet arrangement n’est-il pas un bienfait de la Providence ? Par la manière dont il a été emporté, quelles angoisses épargnées à ce malheureux et aux siens ! Vous le représentez-vous gardant jusqu’à la fin la pleine et entière jouissance de ses facultés ! La lettre de Marie-Gaston serait venue le torturer et ajouter à ses douleurs physiques le supplice de la jalousie. J’aurais été pour lui un fantôme obsédant son lit de mort, et certainement il aurait fait prendre à sa femme un de ces engagements qu’on ne décline jamais au moment su-