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correspondance.

Dieu me pardonne, j’allais oublier de te remercier de ta touchante hospitalité ; mais que le diable m’emporte si mon cœur n’est pas la moitié de la journée sur cette ottomane sacrée où je me vautrais, avec le petit pantalon, sans bas et sans cravate !

Terre ! ciel ! mer ! ô sacrilège ! ô abomination ! ô calamité ! fléau ! peste ! j’ai laissé chez toi mon couteau, le cher couteau qui ne m’abandonne jamais ! Maman prétend que j’ai oublié aussi une serviette à liteaux rouges et un mouchoir. Tu débrouilleras le tout.

Je n’ai pas eu le temps d’aller à l’adresse que M. Varin m’a donnée : j’ai eu des affaires par-dessus la tête. Pendant huit jours, je vais faire à Paris le métier d’un cheval de poste pour les articles de journaux. Si Surville va à Caen, qu’il demande partout Clotilde ; la pauvre polissonne de fille reste en boutique… J’ai l’âme en paix pour mes affaires d’argent, mais je suis sur le gril pour livrer les volumes aux époques fixes.

J’ai lu le commencement de Wann-Chlore[1] : il a plu à Villeparisis.

Papa est bien portant ; tout à l’heure il a manqué me faire étouffer de rire par ses saillies. Bonne maman frise sa maladie de nerfs ; maman est très-bien. Bonne maman prétend qu’il fallait lui envoyer deux chemises à faire, et elle a commencé ce matin celle que j’avais apportée.

Au total, s’il y a chez vous quelque étincelle de pitié, de grandeur d’âme, vous m’enverrez le Vicaire, car un dédit de mille francs m’épouvante.

  1. Cet ouvrage porte aujourd’hui le titre de Jane la Pâle