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correspondance.

xi.

à madame laure surville, à bayeux[1].

Villeparisis, juin 1820.

Si tu veux connaître exactement notre situation, représente-toi d’abord papa se promenant en long dans sa chambre, immédiatement après la lecture du journal ; puis maman dans son lit, encore mal guérie d’une fausse fluxion de poitrine ; Laurence auprès d’elle, et enfin ton cher frère écrivant en face de la cheminée, sur le petit meuble qui supportait jadis ton écritoire ! Quant au chapitre des observations, il y aurait-bien matière à le remplir, mais il faudrait un temps plus calme. D’ailleurs j’arrive de l’Isle-d’Adam, je ne puis encore être au courant des choses et t’en conter bien long.

Ce que je te dirai, c’est que je pense souvent à toi. Tu sais que j’ai des mots favoris que je prends et que je quitte à chaque lune ; eh bien, depuis six semaines, mon mot, c’est celui-ci : « Et Bayeux ?… » Mais, mordicus, il restera en dépit des lunes !

Une nouvelle qui fera sensation dans ta province, c’est l’ensablement du bosquet de Laurence et de notre cour !

Avant-hier, c’était la fête de Villeparisis, assez triste pour nous. Telle ne fut point la fête dernière ; il y avait, en ce temps-là, un jeune troubadour qui tournait autour

  1. Au mois de mai 1820 mademoiselle Laure de Balzac avait épousé M. Midy de la Greneraye Surville, ingénieur des ponts et des chaussées, à qui la Vieille Fille est dédiée.