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correspondance.

permettez-moi de vous soumettre quelques observations sur votre satire de dimanche dernier, la Statue de Napoléon.

Avant tout, je vous féliciterai d’une chose ; quand je vis apparaître votre journal, je craignis sincèrement qu’un homme de votre trempe et de votre talent ne s’engouât des idées révolutionnaires et jacobines, qui redeviennent à la mode et forment chaque jour de nouveaux prosélytes, idées qui nous feraient rétrograder jusqu’au charnier fangeux des Hébert, des Chaumette, des Marat, et que tout homme de cœur et d’intelligence doit combattre et repousser vigoureusement. Votre numéro de dimanche n’a pleinement rassuré là-dessus ; il met Némésis d’accord avec vos précédents ouvrages ; il en fait le pendant polémique de Napoléon en Égypte ; de Waterloo, du Fils de l’homme. Vous donnez un organe de plus au parti bonapartiste et non pas aux gens qui voudraient voir revivre les beaux jours de la Convention et de la Terreur. Encore une fois, monsieur, je vous en félicite.

Mais est-il nécessaire, pour défendre la cause que vous servez, d’attaquer sans cesse et sans relâche une famille malheureuse et exilée ? Vous avez fait à la monarchie légitime une guerre assez rude, vous lui avez porté des coups assez éclatants pour être généreux après la victoire. Aujourd’hui, l’adversaire est désarmé et à terre, et votre vers incisif le poursuit encore. Dès le début de votre pièce, vous montrez votre haine terrible pour cette famille que, l’exil frappe pour la troisième fois. Vous leur faites vos sanglants reproches avec la même acrimonie et le même fiel que s’ils étaient encore sur le trône.

Prenez garde, monsieur ! sur ce chemin on dépasse