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CONTES DRÔLATIQUES.

fossé, se veit excommunié des gens de bien, n’ayant pour amys que les saccageurs de pays et les lombards. Mais les usuriers devinrent bien tost resches comme des bogues de chastaignier, quand il n’eut plus à leur bailler d’aultres gaiges que sa dicte seigneurie de la Roche-Corbon, veu que la Rupes Carbonis relevoyt du Roy notre sire. Alors Bruyn se treuva en belle humeur de descliquer des coups à tors et à travers, casser les clavicules aux aultres et chercher noise à tous pour des vétilles. Ce que voyant, l’abbé de Marmoustiers, son voisin, homme libéral en paroles, luy dit que ce estoyt signe évident de perfection seigneuriale, qu’il marchoyt dans la bonne voye, mais que, s’il alloit desconfire, à la gloire de Dieu, les Mahumetistes qui conchioyent la Terre-Saincte, ce seroyt mieulx encores, et que il reviendroyt sans faulte, plein de richesses et d’indulgences, en Touraine, ou en paradiz, d’où tous les barons estoyent sortis iadis.

Gustave Doré Contes drolatiques page 30 bas
Gustave Doré Contes drolatiques page 30 bas

Ledict Bruyn, admirant le grand sens du prélat, se despartit du pays, harnaché par le monastère et bény par l’abbé, à la ioye de ses voisins et amys. Lors il mit à sac force villes d’Asie et d’Affricque, battit les mescréans sans crier gare, escorchia les