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LE CHASTEAU D’AZAY.

Et en ung pater tous les gens descendirent les degrez. Puis la bonne Régente despescha ses femmes à l’onguent, à la toile à bender les playes, à l’eaue du Bonhomme, à tant de chouses, que elle demoura seule. Lors, advisant ce bel homme pasmé, dit à haulte voix, admirant sa prestance et sa deffuncte bonne mine : — Ha ! Dieu veult me rabbrouer. Pour une paouvre petite foys que, en ma vie, ung maulvais vouloir s’est resveiglé du fund de ma nature et me l’ha endiablottée, ma saincte patronne se fasche et m’enlève le plus ioly gentilhomme que i’aie iamais veu. Pasques Dieu ! par l’âme de mon père, ie feray pendre tous ceulx qui auront mis la main à son trespas !

— Madame, feit Jacques de Beaune en saultant de l’ais où il gizoyt aux pieds de la Régente, ie vis pour vous servir et suis si peu meurdry, que, pour ceste nuict, ie vous promets autant de ioyes que il y ha de mois en l’année, à l’imitation du sieur Hercules, baron païen. Depuis vingt iours, reprint le bon compaignon, se doubtant que, là, besoing estoyt de mentir ung petit pour moyenner les chouses, vécy ie ne sçays combien de rencontres que ie fais de vous, dont ie me suis affollé, et n’osoys, par grant respect de vostre personne, m’advancer à vous ; mais comptez que ie suis bien yvre de vos royales beaultez, pour avoir inventé la bourde à quoy ie doibs l’heur d’estre à vos pieds.

Là-dessus, il les baisa bien amoureusement, et resguarda la bonne dame d’ung air à tout ruyner. La dicte Régente, par force de l’aage, lequel ne respecte point les roynes, estoyt, comme ung chascun sçayt, en la secunde ieunesse des dames. Ores, en ceste criticque et rude saison, les femmes iadis saiges et desnuées