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CONTES DRÔLATIQUES.

vreries, ou les orphebvreries ne se trouvoyent point à son goust, tant que le bonhomme fouilla dans une layette cachée pour monstrer au Roy un gros diamant blanc.

— Ma mye, dit-il alors à la belle fille pendant que le père avoyt le nez en la layette, vous n’estes pas faicte pour vendre des pierreries, mais pour en recepvoir ; et si, de toutes ces bagues, vous me donnez le choix, i’en sçay une dont icy l’on est affollé, laquelle me plaist, dont à tousiours seray subiect ou serviteur, et dont le royaulme de France ne pourra iamais payer le prix.

— Ah ! Sire, reprint la belle fille, ie me marie demain. Mais, si vous me baillez le poignard qui est à vostre ceinture, ie deffendray ma fleur et vous la reserveray pour observer l’Évangile, où il est dict : Donnez à Cesar ce qui est à Cesar.

Tost le Roy luy donna la petite dague ; et ceste vaillante response l’enamoura de la fille à en perdre le mangier. Il fait son partement, en intention de logier ceste nouvelle mye à la rue de l'Hirundelle, en ung sien hostel. Voilà mon advocat, pressé de soy brider, qui, au grant despit de ses corrivaulx, mène son espousée au bruict des clochiers, avecques musicques, faict des festins à donner des diarrhées, et, le soir, après les dances, vient en la chambre de son logiz où debvoyt estre couchiée la belle fille ; non plus la belle fille, mais lutin processif, mais enraigée diablesse, qui, sise en ung sien fauteuil, n’avoyt voulu se mettre