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II. LIVRE, SCÈNES DE LA VIE DE PROVINCE.

travaillait avec ardeur ; elle comprenait l’importance d’une grande instruction pour une femme du monde, et tout le temps qu’elle ne donnait pas au chant, à l’étude de l’Harmonie et de la Composition, elle le passait à lire les livres que lui choisissait l’abbé Chaperon dans la riche bibliothèque de son parrain. Tout en menant cette vie occupée, elle souffrait, mais sans se plaindre. Parfois elle restait des heures entières à regarder la fenêtre de Savinien. Le dimanche, à la sortie de la messe, elle suivait madame de Portenduère en la contemplant avec tendresse, car, malgré ses duretés, elle aimait en elle la mère de Savinien. Sa piété redoublait, elle allait à la messe tous les matins, car elle crut fermement que ses rêves étaient une faveur de Dieu. Effrayé des ravages produits par cette nostalgie de l’amour, le jour de la naissance d’Ursule son parrain lui promit de la conduire à Toulon voir le départ de l’expédition d’Alger sans que Savinien, qui en faisait partie, en fût instruit. Le juge de paix et le curé gardèrent le secret au docteur sur le but de ce voyage, qui parut être entrepris pour la santé d’Ursule, et qui intrigua beaucoup les héritiers Minoret. Après avoir revu Savinien en uniforme d’aspirant, après avoir monté sur le beau vaisseau de l’amiral, à qui le ministre avait recommandé le jeune Portenduère, Ursule, à la prière de son ami, alla respirer l’air de Nice, et parcourut la côte de la Méditerranée jusqu’à Gênes, où elle apprit l’arrivée de la flotte devant Alger et les heureuses nouvelles du débarquement. Le docteur aurait voulu continuer ce voyage à travers l’Italie, autant pour distraire Ursule que pour achever en quelque sorte son éducation en agrandissant ses idées par la comparaison des mœurs, des pays, et par les enchantements de la terre où vivent les chefs-d’œuvre de l’art, et où tant de civilisations ont laissé leurs traces brillantes ; mais la nouvelle de la résistance opposée par le trône aux électeurs de la fameuse Chambre de 1830 ramena le docteur en France, où il ramena sa pupille dans un état de santé florissante et riche d’un charmant petit modèle du vaisseau sur lequel servait Savinien.

Les Élections de 1830 donnèrent de la consistance aux héritiers qui, par les soins de Désiré Minoret et de Goupil, formèrent à Nemours un comité dont les efforts firent nommer à Fontainebleau le candidat libéral. Massin exerçait une énorme influence sur les électeurs de la campagne. Cinq des fermiers du maître de poste étaient électeurs. Dionis représentait plus de onze voix. En se réunissant chez le notaire, Crémière, Massin, le maître de poste et leurs adhé-