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Les huissiers fondront sur toi peut-être trop tôt, malgré les détours que nous allons faire devant eux…

— Je tiens mon secret ! répondit David avec la naïveté du savant.

— Eh ! bien, ton secret sera ta planche de salut, reprit Petit-Claud repoussé dans sa première et loyale intention d’éviter un procès par une transaction, je ne veux pas le savoir ; mais écoute-moi bien : tâche de travailler dans les entrailles de la terre, que personne ne te voie et ne puisse soupçonner tes moyens d’exécution, car ta planche te serait volée sous tes pieds… Un inventeur cache souvent sous sa peau un jobard ! Vous pensez trop à vos secrets pour pouvoir penser à tout. On finira par se douter de l’objet de tes recherches, tu es environné de fabricants ! Autant de fabricants, autant d’ennemis ! Je te vois comme le castor au milieu des chasseurs, ne leur donne pas ta peau…

— Merci, mon cher camarade, je me suis dit tout cela, s’écria Séchard ; mais je te suis obligé de me montrer tant de prudence et de sollicitude !… Il ne s’agit pas de moi dans cette entreprise. À moi, douze cents francs de rente me suffiraient, et mon père doit m’en laisser au moins trois fois autant quelque jour… Je vis par l’amour et par ma pensée !… une vie céleste… Il s’agit de Lucien et de ma femme ; c’est pour eux que je travaille…

— Allons, signe-moi ce pouvoir, et ne t’occupe plus que de ta découverte. Le jour où il faudra te cacher à cause de la contrainte par corps, je te préviendrai la veille ; car il faut tout prévoir. Et laisse-moi te dire de ne laisser pénétrer chez toi personne de qui tu ne sois sûr comme de toi-même.

— Cérizet n’a pas voulu continuer le bail de l’exploitation de mon imprimerie, et de là sont venus nos petits chagrins d’argent. Il ne reste donc plus chez moi que Marion, Kolb, un Alsacien qui est comme un caniche pour moi, ma femme et ma belle-mère…

— Écoute, dit Petit-Claud, défie-toi du caniche…

— Tu ne le connais pas, s’écria David. Kolb, c’est comme moi-même.

— Veux-tu me le laisser éprouver ?…

— Oui, dit Séchard.

— Allons, adieu ; mais envoie-moi la belle madame Séchard, un pouvoir de ta femme est indispensable. Et, mon ami, songe bien que le feu est dans tes affaires, dit Petit-Claud à son camarade