articles et des prospectus. Mais vous êtes à moi, n’est-ce pas ? Je puis compter sur vous.
Lucien serra la main de Finot avec un transport de joie inouï.
— N’ayons pas l’air de nous être entendus, lui dit Finot à l’oreille en poussant la porte d’une mansarde au cinquième étage de la maison, et située au fond d’un long corridor.
Lucien aperçut alors Lousteau, Félicien Vernou, Hector Merlin et deux autres rédacteurs qu’il ne connaissait pas, tous réunis à une table couverte d’un tapis vert, devant un bon feu, sur des chaises ou des fauteuils, fumant ou riant. La table était chargée de papiers, il s’y trouvait un véritable encrier plein d’encre, des plumes assez mauvaises, mais qui servaient aux rédacteurs. Il fut démontré au nouveau journaliste que là s’élaborait le grand œuvre.
— Messieurs, dit Finot, l’objet de la réunion est l’installation en mon lieu et place de notre cher Lousteau comme rédacteur en chef du journal que je suis obligé de quitter. Mais, quoique mes opinions subissent une transformation nécessaire pour que je puisse passer rédacteur en chef de la Revue dont les destinées vous sont connues, mes convictions sont les mêmes et nous restons amis. Je suis tout à vous, comme vous serez à moi. Les circonstances sont variables, les principes sont fixes. Les principes sont le pivot sur lequel marchent les aiguilles du baromètre politique.
Tous les rédacteurs partirent d’un éclat de rire.
— Qui t’a donné ces phrases-là ? demanda Lousteau.
— Blondet, répondit Finot.
— Vent, pluies, tempête, beau fixe, dit Merlin, nous parcourrons tout ensemble.
— Enfin, reprit Finot, ne nous embarbouillons pas dans les métaphores : tous ceux qui auront quelques articles à m’apporter retrouveront Finot. Monsieur, dit-il en présentant Lucien, est des vôtres. J’ai traité avec lui, Lousteau.
Chacun complimenta Finot sur son élévation et sur ses nouvelles destinées.
— Te voilà à cheval sur nous et sur les autres, lui dit l’un des rédacteurs inconnus à Lucien, tu deviens Janus…
— Pourvu qu’il ne soit pas Janot, dit Vernou.
— Tu nous laisses attaquer nos bêtes noires ?
— Tout ce que vous voudrez ! dit Finot.
— Ah ! mais ! dit Lousteau, le journal ne peut pas reculer. Mon-