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nait de débuter au journal des Débats par des articles de la plus grande portée, entra, donna la main à Finot, à Lousteau, et salua légèrement Vernou.

— Viens souper avec nous, à minuit, chez Florine, lui dit Lousteau.

— J’en suis, dit le jeune homme. Mais qu’y a-t-il ?

— Ah ! il y a, dit Lousteau, Florine et Matifat le droguiste ; Du Bruel, l’auteur qui a donné un rôle à Florine pour son début ; un petit vieux, le père Cardot et son gendre Camusot ; puis Finot…

— Fait-il les choses convenablement, ton droguiste ?

— Il ne nous donnera pas de drogues, dit Lucien.

— Monsieur a beaucoup d’esprit, dit sérieusement Blondet en regardant Lucien. Il est du souper, Lousteau ?

— Oui.

— Nous rirons bien.

Lucien avait rougi jusqu’aux oreilles.

— En as-tu pour long-temps, Dauriat ? dit Blondet en frappant à la vitre qui donnait au-dessus du bureau de Dauriat.

— Mon ami, je suis à toi.

— Bon, dit Lousteau à son protégé. Ce jeune homme, presque aussi jeune que vous, est aux Débats. Il est un des princes de la critique : il est redouté, Dauriat viendra le cajoler, et nous pourrons alors dire notre affaire au Pacha des vignettes et de l’imprimerie. Autrement, à onze heures notre tour ne serait pas venu. L’audience se grossira de moment en moment.

Lucien et Lousteau s’approchèrent alors de Blondet, de Finot, de Vernou, et allèrent former un groupe à l’extrémité de la boutique.

— Que fait-il ? dit Blondet à Gabusson, le premier commis qui se leva pour venir le saluer.

— Il achète un journal hebdomadaire qu’il veut restaurer afin de l’opposer à l’influence de la Minerve qui sert trop exclusivement Eymery, et au Conservateur qui est trop aveuglément romantique.

— Payera-t-il bien ?

— Mais comme toujours… trop ! dit le caissier.

En ce moment un jeune homme entra, qui venait de faire paraître un magnifique roman, vendu rapidement et couronné par le plus beau succès, un roman dont la seconde édition s’imprimait