Enfin, si par quelque inspiration diabolique il s’était fait si petit qu’il se fût glissé dans une retraite inimaginable (car on peut tout attendre d’un célibataire), eh ! bien, ou votre femme ne pourra s’empêcher de regarder cet endroit mystérieux, ou elle feindra de jeter les yeux sur un côté tout opposé, et alors rien n’est plus facile à un mari que de tendre une petite souricière à sa femme.
La cachette étant découverte, vous marchez droit à l’amant. Vous le rencontrez !…
Là, vous tâcherez d’être beau. Tenez constamment votre tête de trois quarts en la relevant d’un air de supériorité. Cette attitude ajoutera beaucoup à l’effet que vous devez produire.
La plus essentielle de vos obligations consiste en ce moment à écraser le célibataire par une phrase très-remarquable, que vous aurez eu tout le temps d’improviser ; et, après l’avoir terrassé, vous lui indiquerez froidement qu’il peut sortir. Vous serez très-poli, mais aussi tranchant que la hache d’un bourreau, et plus impassible que la loi. Ce mépris glacial amènera peut-être déjà une péripétie dans l’esprit de votre femme. Point de cris, point de gestes, pas d’emportements. Les hommes des hautes sphères sociales, a dit un jeune auteur anglais, ne ressemblent jamais à ces petites gens qui ne sauraient perdre une fourchette sans sonner l’alarme dans tout le quartier.
Le célibataire parti, vous vous trouvez seul avec votre femme ; et, dans cette situation, vous devez la reconquérir pour toujours.
En effet, vous vous placez devant elle, en prenant un de ces airs dont le calme affecté trahit des émotions profondes ; puis, vous choisirez dans les idées suivantes que nous vous présentons en forme d’amplification rhétoricienne, celles qui pourront convenir à vos principes : — Madame, je ne vous parlerai ni de vos serments, ni de mon amour ; car vous avez trop d’esprit et moi trop de fierté pour que je vous assomme des plaintes banales que tous les maris sont en droit de faire en pareil cas ; leur moindre défaut alors est d’avoir trop raison. Je n’aurai même, si je puis, ni colère, ni ressentiment. Ce n’est pas moi qui suis outragé ; car j’ai trop de cœur pour être effrayé de cette opinion commune qui frappe presque toujours très-justement de ridicule et de réprobation un mari dont la femme se conduit mal. Je m’examine, et je ne vois pas par où j’ai pu mériter, comme la plupart d’entre eux, d’être trahi. Je vous aime encore.
Je n’ai jamais manqué, non pas à mes devoirs, car je n’ai trouvé