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des décrets, que l’apparition des femmes sur la scène politique ! Ces illustres Romaines, condamnées à n’être qu’épouses et mères, passèrent leur vie dans la retraite, occupées à élever des maîtres pour le monde. Rome n’eut point de courtisanes, parce que la jeunesse y était occupée à des guerres éternelles. Si plus tard la dissolution vint, ce fut avec le despotisme des empereurs ; et encore, les préjugés fondés par les anciennes mœurs étaient-ils si vivaces, que Rome ne vit jamais de femmes sur un théâtre. Ces faits ne seront pas perdus pour cette rapide histoire du mariage en France.

Les Gaules conquises, les Romains imposèrent leurs lois aux vaincus ; mais elles furent impuissantes à détruire et le profond respect de nos ancêtres pour les femmes, et ces antiques superstitions qui en faisaient les organes immédiats de la Divinité. Les lois romaines finirent cependant par régner exclusivement à toutes autres dans ce pays appelé jadis de droit écrit qui représentait la Gallia togata, et leurs principes conjugaux pénétrèrent plus ou moins dans les pays de coutumes.

Mais pendant ce combat des lois contre les mœurs, les Francs envahissaient les Gaules, auxquelles ils donnèrent le doux nom de France. Ces guerriers, sortis du nord, y importaient le système de galanterie né dans leurs régions occidentales, où le mélange des sexes n’exige pas, sous des climats glacés, la pluralité des femmes et les jalouses précautions de l’Orient. Loin de là, chez eux, ces créatures presque divinisées réchauffaient la vie privée par l’éloquence de leurs sentiments. Les sens endormis sollicitaient cette variété de moyens énergiques et délicats, cette diversité d’action, cette irritation de la pensée et ces barrières chimériques créées par la coquetterie, système dont quelques principes ont été développés dans cette Première Partie, et qui convient admirablement au ciel tempéré de la France.

À l’Orient donc, la passion et son délire, les longs cheveux bruns et les harems, les divinités amoureuses, la pompe, la poésie et les monuments. À l’Occident, la liberté des femmes, la souveraineté de leurs blondes chevelures, la galanterie, les fées, les sorcières, les profondes extases de l’âme, les douces émotions de la mélancolie, et les longues amours.

Ces deux systèmes partis des deux points opposés du globe vinrent lutter en France ; en France, où une partie du sol, la Langue d’Oc,