Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/262

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Espérance ne va pas sans la Charité, la Foi ne va pas sans la Prière : les quatre faces de ce carré sont solidaires. « Faute d’une vertu, dit-il, l’Esprit Angélique est comme une perle brisée. » Chacun de ces existers est donc un cercle dans lequel s’enroulent les richesses célestes de l’état antérieur. La grande perfection des Esprits Angéliques vient de cette mystérieuse progression par laquelle rien ne se perd des qualités successivement acquises pour arriver à leur glorieuse incarnation ; car à chaque transformation ils se dépouillent insensiblement de la chair et de ses erreurs. Quand il vit dans l’Amour, l’homme a quitté toutes ses passions mauvaises : l’Espérance, la Charité, la Foi, la Prière ont, suivant le mot d’Isaïe, vanné son intérieur qui ne doit plus être pollué par aucune des affections terrestres. De là cette grande parole de saint Luc : Faites-vous un trésor qui ne périsse pas dans les cieux. Et celle de Jésus-Christ : Laissez ce monde aux hommes, il est à eux ; faites-vous purs, et venez chez mon père. La seconde transformation est la Sagesse. La Sagesse est la compréhension des choses célestes auxquelles l’Esprit arrive par l’Amour. L’Esprit d’Amour a conquis la force, résultat de toutes les passions terrestres vaincues, il aime aveuglément Dieu ; mais l’Esprit de Sagesse a l’intelligence et sait pourquoi il aime. Les ailes de l’un sont déployées et l’emportent vers Dieu, les ailes de l’autre sont repliées par la terreur que lui donne la Science : il connaît Dieu. L’un désire incessamment voir Dieu et s’élance vers lui, l’autre y touche et tremble. L’union qui se fait d’un Esprit d’amour et d’un Esprit de Sagesse met la créature à l’état divin pendant lequel son âme est femme, et son corps est homme, dernière expression humaine où l’Esprit l’emporte sur la Forme, où la forme se débat encore contre l’Esprit divin ; car la forme, la chair, ignore, se révolte, et veut rester grossière. Cette épreuve suprême engendre des souffrances inouïes que les cieux voient seuls, et que le Christ a connues dans le jardin des Oliviers. Après la mort le premier ciel s’ouvre à cette double nature humaine purifiée. Aussi les hommes meurent-ils dans le désespoir, tandis que l’Esprit meurt dans le ravissement. Ainsi le Naturel, état dans lequel sont les êtres non régénérés ; le Spirituel, état dans lequel sont les Esprits Angéliques ; et le Divin, état dans lequel demeure l’Ange avant de briser son enveloppe, sont les trois degrés de l’exister par lesquels l’homme parvient au ciel. Une pensée de