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ce phénomène, reprenait aussitôt sans lui laisser la moindre incommodité. Ces effets d’antipathies authentiques prises parmi toutes celles que les hasards de l’histoire ont illustrées, peuvent suffire à comprendre les effets des sympathies inconnues. Ce fragment d’investigation que je me suis rappelé entre tous les aperçus de Lambert, fera concevoir la méthode avec laquelle il procédait dans ses œuvres. Je ne crois pas devoir insister sur la connexité qui liait à cette théorie les sciences équilatérales inventées par Gall et Lavater ; elles en étaient les corollaires naturels, et tout esprit légèrement scientifique apercevra les ramifications par lesquelles s’y rattachaient nécessairement les observations phrénologiques de l’un et les documents physiognomoniques de l’autre. La découverte de Mesmer, si importante et si mal appréciée encore, se trouvait tout entière dans un seul développement de ce Traité, quoique Louis ne connût pas les œuvres, d’ailleurs assez laconiques, du célèbre docteur suisse. Une logique et simple déduction de ses principes lui avait fait reconnaître que la Volonté pouvait, par un mouvement tout contractile de l’être intérieur, s’amasser ; puis, par un autre mouvement, être projetée au dehors, et même être confiée à des objets matériels. Ainsi la force entière d’un homme devait avoir la propriété de réagir sur les autres, et de les pénétrer d’une essence étrangère à la leur, s’ils ne se défendaient contre cette agression. Les preuves de ce théorème de la Science humaine sont nécessairement multipliées ; mais rien ne les constate authentiquement. Il a fallu, soit l’éclatant désastre de Marius et son allocution au Cimbre chargé de le tuer, soit l’auguste commandement d’une mère au lion de Florence, pour faire connaître historiquement quelques-uns de ces foudroiements de la pensée. Pour lui donc la Volonté, la Pensée étaient des forces vives ; aussi en parlait-il de manière à vous faire partager ses croyances. Pour lui, ces deux puissances étaient en quelque sorte et visibles et tangibles. Pour lui, la Pensée était lente ou prompte, lourde ou agile, claire ou obscure ; il lui attribuait toutes les qualités des êtres agissants, la faisait saillir, se reposer, se réveiller, grandir, vieillir, se rétrécir, s’atrophier, s’aviver ; il en surprenait la vie en en spécifiant tous les actes par les bizarreries de notre langage ; il en constatait la spontanéité, la force, les qualités avec une sorte d’intuition qui lui faisait reconnaître tous les phénomènes de cette substance.

— Souvent au milieu du calme et du silence, me disait-il, lors-