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quel ce prince voulait se débarrasser par deux ordonnances. Ne sera-ce pas une amère dérision ? La ruse est-elle permise au pouvoir contre la ruse ? doit-il tuer ceux qui le veulent tuer ? Les massacres de la Révolution répondent aux massacres de la Saint-Barthélemi. Le peuple devenu roi a fait contre la noblesse et le roi, ce que le roi et la noblesse ont fait contre les insurgés du seizième siècle. Ainsi les écrivains populaires, qui savent très-bien qu’en semblable occurrence le peuple agirait encore de même, sont sans excuse quand ils blâment Catherine de Médicis et Charles IX. Tout pouvoir, comme le disait Casimir Périer en apprenant ce que devait être le pouvoir, est une conspiration permanente. On admire les maximes antisociales que publient d’audacieux écrivains, pourquoi donc la défaveur qui s’attache en France aux vérités sociales quand elles se produisent hardiment ? Cette question explique à elle seule toutes les erreurs historiques. Appliquez la solution de cette demande aux doctrines dévastatrices qui flattent les passions populaires et aux doctrines conservatrices qui répriment les sauvages ou folles entreprises du peuple ; et vous trouverez la raison de l’impopularité, comme de la popularité de certains personnages. Laubardemont et Laffemas étaient, comme certaines gens d’aujourd’hui, dévoués à la défense du pouvoir auquel ils croyaient. Soldats ou juges, ils obéissaient les uns et les autres à une royauté. D’Orthez aujourd’hui serait destitué pour avoir méconnu les ordres du ministère, et Charles IX lui laissa le gouvernement de sa province. Le pouvoir de tous ne compte avec personne, le pouvoir d’un seul est obligé de compter avec les sujets, avec les grands comme avec les petits.

Catherine, comme Philippe II et le duc d’Albe, comme les Guise et le cardinal Granvelle, ont aperçu l’avenir que la Réformation réservait à l’Europe ; ils ont vu les monarchies, la religion, le pouvoir ébranlés ! Catherine écrivit aussitôt, au fond du cabinet des rois de France, un arrêt de mort contre cet esprit d’examen qui menaçait les sociétés modernes, arrêt que Louis XIV a fini par exécuter. La révocation de l’Édit de Nantes ne fut une mesure malheureuse qu’à cause de l’irritation de l’Europe contre Louis XIV. Dans un autre temps, l’Angleterre, la Hollande et l’Empire n’eussent pas encouragé chez eux les bannis français et la révolte en France.

Pourquoi refuser de nos jours à la majestueuse adversaire de la plus inféconde des hérésies la grandeur qu’elle a tirée de sa lutte même ? Les Calvinistes ont beaucoup écrit contre le Stratagème de