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le granit, il pleura, s’assit et resta là, contemplant avec une, tristesse profonde la scène implacable qui s’offrait à ses regards. Il cria comme pour tenter la solitude. Sa voix, perdue dans les cavités de l’éminence, rendit au loin un son maigre qui ne réveilla point d’écho ; l’écho était dans son cœur : le Provençal avait vingt-deux ans, il arma sa carabine.

— Il sera toujours bien temps ! se dit-il en posant à terre l’arme libératrice.

Regardant tour à tour l’espace noirâtre et l’espace bleu, le soldat rêvait à la France. Il sentait avec délices les ruisseaux de Paris, il se rappelait les villes par lesquelles il avait passé, les figures de ses camarades, et les plus légères circonstances de sa vie. Enfin, son imagination méridionale lui fit bientôt entrevoir les cailloux de sa chère Provence dans les jeux de la chaleur qui ondoyait au-dessus de la nappe étendue dans le désert. Craignant tous les dangers de ce cruel mirage, il descendit le revers opposé à celui par lequel il était monté, la veille, sur la colline. Sa joie fut grande en découvrant une espèce de grotte, naturellement taillée dans les immenses fragments de granit qui formaient la base de ce monticule. Les débris d’une natte annonçaient que cet asile avait été jadis habité. Puis à quelques pas il aperçut des palmiers chargés de dattes. Alors l’instinct qui nous attache à la vie se réveilla dans son cœur. Il espéra vivre assez pour attendre le passage de quelques Maugrabins, ou peut-être ! entendrait-il bientôt le bruit des canons ; car, en ce moment, Bonaparte parcourait l’Égypte. Ranimé par cette pensée, le Français abattit quelques régimes de fruits murs sous le poids desquels les dattiers semblaient fléchir, et il s’assura en goûtant cette manne inespérée, que l’habitant de la grotte avait cultivé les palmiers. La chair savoureuse et fraîche de la datte accusait en effet les soins de son prédécesseur. Le Provençal passa subitement d’un sombre désespoir à une joie presque folle. Il remonta sur le haut de la colline, et s’occupa pendant le reste du jour à couper un des palmiers inféconds qui, la veille, lui avaient servi de toit. Un vague souvenir lui fit penser aux animaux du désert ; et, prévoyant qu’ils pourraient venir boire à la source perdue dans les sables qui apparaissait au bas des quartiers de roche, il résolut de se garantir de leurs visites en mettant une barrière à la porte de son ermitage. Malgré son ardeur, malgré les forces que lui donna la peur d’être dévoré pendant son sommeil, il lui fut impossible de couper