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— Il suffit, dit Malin effrayé de la perspicacité du préfet de police, que ce soient mes ennemis pour que j’imite la conduite de Votre Majesté ; je demande donc leur radiation et me constitue leur avocat auprès d’elle.

— Ils seront moins dangereux pour nous, réintégrés qu’émigrés, car ils auront prêté serment aux constitutions de l’empire et aux lois, dit Fouché qui regarda fixement Malin.

— En quoi menacent-ils monsieur le sénateur ? dit Napoléon.

Talleyrand s’entretint pendant quelque temps à voix basse avec l’empereur. La radiation et la réintégration de messieurs de Simeuse et d’Hauteserre parut alors accordée.

— Sire, dit Fouché, vous pourrez encore entendre parler de ces gens-là.

Talleyrand, sur les sollicitations du duc de Grandlieu, venait de donner, au nom de ces messieurs, leur foi de gentilhomme, mot qui exerçait des séductions sur Napoléon, qu’ils n’entreprendraient rien contre l’empereur, et faisaient leur soumission sans arrière-pensée.

— Messieurs d’Hauteserre et de Simeuse ne veulent plus porter les armes contre la France après les derniers événements. Ils ont peu de sympathie pour le gouvernement impérial, et sont de ces gens que Votre Majesté devra conquérir ; mais ils se contenteront de vivre sur le sol français en obéissant aux lois, dit le ministre.

Puis il mit sous les yeux de l’Empereur une lettre qu’il avait reçue, et où ces sentiments étaient exprimés.

— Ce qui est si franc doit être sincère, dit l’empereur en regardant Lebrun et Cambacérès. Avez-vous encore des objections ? demanda-t-il à Fouché.

— Dans l’intérêt de Votre Majesté, répondit le futur ministre de la Police générale, je demande à être chargé de transmettre à ces messieurs leur radiation quand elle sera définitivement accordée, dit-il à haute voix.

— Soit, dit Napoléon en trouvant une expression soucieuse dans le visage de Fouché.

Ce petit conseil fut levé sans que cette affaire parût terminée ; mais il eut pour résultat de mettre dans la mémoire de Napoléon une note douteuse sur les quatre gentilshommes. Monsieurs d’Hauteserre, qui croyait au succès, avait écrit une lettre où il annonçait cette bonne nouvelle. Les habitants de Cinq-Cygne ne furent donc