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intelligents en leur donnant pour chef un capitaine habile. Corentin indiqua pour lieu de rendez-vous le château de Gondreville à ce capitaine, en lui disant d’envoyer à la nuit, sur quatre points différents de la vallée de Cinq-Cygne et à d’assez grandes distances pour ne pas donner l’alarme, un piquet de douze hommes. Ces quatre piquets devaient décrire un carré et le resserrer autour du château de Cinq-Cygne. En le laissant maître au château pendant sa consultation avec Grévin, Malin avait permis à Corentin de remplir une partie de sa mission. À son retour du parc, le conseiller d’État avait si positivement dit à Corentin que les Simeuse et les d’Hauteserre étaient dans le pays, que les deux agents expédièrent le capitaine qui, fort heureusement pour les gentilshommes, traversa la forêt par l’avenue pendant que Michu grisait son espion Violette. Le Conseiller d’État avait commencé par expliquer à Peyrade et à Corentin le guet-apens auquel il venait d’échapper. Les deux Parisiens lui racontèrent alors l’épisode de la carabine, et Grévin envoya Violette pour obtenir quelques renseignements sur ce qui se passait au pavillon. Corentin dit au notaire d’emmener, pour plus de sûreté, son ami le conseiller d’État coucher à la petite ville d’Arcis, chez lui. Au moment où Michu se lançait dans la forêt et courait à Cinq-Cygne, Peyrade et Corentin partirent donc de Gondreville dans un méchant cabriolet d’osier, attelé d’un cheval de poste, et conduit par le brigadier d’Arcis, un des hommes les plus rusés de la légion, et que le commandant de Troyes leur avait recommandé de prendre.

— Le meilleur moyen de tout saisir est de les prévenir, dit Peyrade à Corentin. Au moment où ils seront effarouchés, où ils voudront sauver leurs papiers ou s’enfuir, nous tomberons chez eux comme la foudre. Le cordon de gendarmes en se resserrant autour du château fera l’effet d’un coup de filet. Ainsi, nous ne manquerons personne.

— Vous pouvez leur envoyer le maire, dit le brigadier, il est complaisant, il ne leur veut pas de mal, ils ne se défieront pas de lui.

Au moment où Goulard allait se coucher, Corentin, qui fit arrêter le cabriolet dans un petit bois, était donc venu lui dire confidentiellement que dans quelques instants un agent du gouvernement allait le requérir de cerner le château de Cinq-Cygne afin d’y empoigner messieurs d’Hauteserre et de Simeuse ; que, dans le cas où ils auraient disparu, l’on voulait s’assurer s’ils y avaient couché