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FLEURY.

Madame Colleville a fini par prendre le plus court… le chemin de la sacristie…

THUILLIER (sèchement).

Je suis trop l’ami de Colleville pour ne pas vous prier, monsieur Fleury, de ne pas parler légèrement de sa femme.

PHELLION.

Jamais les femmes, qui n’ont aucun moyen de défense, ne devraient être le sujet de nos conversations…

VIMEUX.

D’autant plus que la jolie madame Colleville n’a pas voulu recevoir Fleury, et qu’il la dénigre par vengeance.

FLEURY.

Elle n’a pas voulu me recevoir sur le même pied que Thuillier, mais j’y suis allé…

THUILLIER.

Quand ?… Où ?… sous ses fenêtres…

Quoique Fleury fut redouté dans les Bureaux pour sa crânerie, il accepta silencieusement le dernier mot de Thuillier. Cette résignation, qui surprit les employés, avait pour cause un billet de deux cents francs, d’une signature assez douteuse, que Thuillier devait présenter à mademoiselle Thuillier, sa sœur. Après cette escarmouche, un profond silence s’établit. Chacun travailla de une heure à trois heures. Du Bruel ne revint pas.

Vers trois heures et demie, les apprêts du départ, le brossage des chapeaux, le changement des habits, s’opéra simultanément dans tous les bureaux du Ministère. Cette chère demi-heure, employée à de petits soins domestiques, abrège d’autant la séance. En ce moment, les pièces trop chaudes s’attiédissent, l’odeur particulière aux Bureaux s’évapore, le silence revient. À quatre heures, il ne reste plus que les véritables employés, ceux qui prennent leur état au sérieux. Un ministre peut connaître les travailleurs de son Ministère en faisant une tournée à quatre heures précises, espionnage qu’aucun de ces graves personnages ne se permet.

À cette heure, dans les cours, quelques chefs s’abordèrent pour se communiquer leurs idées sur l’événement de la journée. Généralement, en s’en allant deux à deux, trois à trois, on concluait en faveur de Rabourdin ; mais les vieux routiers comme monsieur Clergeot branlaient la tête en disant : Habent sua sidera lites. Saillard