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VIMEUX.

Je me mets dans le pari. Vous y mettez-vous, monsieur Poiret ?

POIRET.

J’ai ma retraite au premier janvier.

BIXIOU.

Comment, nous ne verrons plus vos souliers à cordons, et que deviendra le ministère sans vous ? Qui se met de mon pari ?

DUTOCQ.

Je ne puis en être, je parierais à coup sûr. Monsieur Rabourdin est nommé, monsieur de La Billardière l’a recommandé sur son lit de mort aux deux ministres, en s’accusant d’avoir touché les émoluments d’une place dont le travail était fait par Rabourdin : il a eu des scrupules de conscience ; et, sauf tout ordre supérieur, ils lui ont promis, pour le calmer, de nommer Rabourdin.

BIXIOU.

Messieurs, mettez-vous tous contre moi : vous voilà sept ? car vous en serez, monsieur Phellion. Je parie un dîner de cinq cents francs au Rocher de Cancale que Rabourdin n’a pas la place de La Billardière. Ça ne vous coûtera pas cent francs à chacun, et moi j’en risque cinq cents. Je vous fais la chouette enfin. Ça va-t-il ? En êtes-vous, du Bruel ?

PHELLION (posant sa plume).

Môsieur, sur quoi fondez-vous cette proposition aléatoire, car aléatoire est le mot ; mais je me trompe en employant le terme de proposition, c’est contrat que je voulais dire. Le pari constitue un contrat.

FLEURY.

Non, car on ne peut donner le nom de contrat qu’aux conventions reconnues par le code, et le code n’accorde pas d’action pour le pari.

DUTOCQ.

C’est le reconnaître que de le proscrire.

BIXIOU.

Ça, c’est fort, mon petit Dutocq !

POIRET.

Par exemple !

FLEURY.

C’est juste. C’est comme se refuser au paiement de ses dettes, on les reconnaît.