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des frais de perception. Le tabac et la poudre s’affermaient en régie, sous une surveillance. Le système sur ces deux régies, développé par d’autres que Rabourdin lors du renouvellement de la loi sur les tabacs, était si convaincant que cette loi n’eût point passé dans une Chambre à qui l’on n’aurait pas mis le marché à la main, comme le fit alors le ministère. Ce fut alors moins une question de finance qu’une question de gouvernement. L’État ne possédait plus rien en propre, ni forêts, ni mines, ni exploitations. Aux yeux de Rabourdin, l’État, possesseur de domaines, constituait un contre-sens administratif, car l’État ne sait pas faire valoir et se prive de contributions ; il perd deux produits à la fois. Quant aux fabriques du gouvernement, c’était le même non-sens reporté dans la sphère de l’industrie. L’État obtient des produits plus coûteux que ceux du commerce, plus lentement confectionnés, et manque à percevoir ses droits sur les mouvements de l’Industrie, à laquelle il retranche des alimentations. Était-ce administrer un pays que d’y fabriquer au lieu d’y faire fabriquer, d’y posséder au lieu de créer le plus de possessions diverses ? L’État n’exigeait plus un seul cautionnement en argent. Rabourdin n’admettait que des cautionnements hypothécaires. Voici pourquoi. Ou l’État gardait le cautionnement en nature, et c’était gêner le mouvement de l’argent ; ou il l’employait à un taux supérieur à l’intérêt qu’il en donnait, et c’était un vol ignoble ; ou il y perdait, et c’était une sottise ; enfin, s’il disposait un jour de la masse des cautionnements, il préparait dans certains cas une banqueroute horrible. L’impôt territorial disparaissait donc en partie, Rabourdin en conservait une faible portion, ne fût-ce que comme point de départ en cas de guerre ; mais évidemment les productions du sol devenaient libres, et l’Industrie, en trouvant les matières premières à bas prix, pouvait lutter avec l’étranger dans le secours trompeur des Douanes. Les riches administraient gratuitement les Départements, en ayant pour récompense la pairie sous certaines conditions. Les magistrats, les corps savants, les officiers inférieurs voyaient leurs services honorablement récompensés. Il n’y avait pas d’employé qui n’obtînt une immense considération, méritée par l’étendue de ses travaux et l’importance de ses appointements ; chacun d’eux pensait lui-même à son avenir, et la France n’avait plus sur le corps le cancer des pensions. En résultat, Rabourdin trouvait sept cents millions de dépenses seulement et douze cents millions de recettes. Il était clair qu’un remboursement