Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/77

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on imite la France. Mais, je vous en supplie, ne parlons pas politique, c’est un terrain brûlant.

INÈS.

Mon père, général, avait-il reçu nos lettres ?

VAUTRIN.

Dans une pareille bagarre, les lettres peuvent bien se perdre, quand les couronnes ne se retrouvent pas.

LA DUCHESSE DE CHRISTOVAL.

Et qu’est devenu M. de Christoval ?

VAUTRIN.

Le viel Amoagos, qui là-bas exerce une énorme influence, a sauvé votre mari, au moment où j’allais le faire fusiller…

LA DUCHESSE DE CHRISTOVAL et SA FILLE.

Ah !

VAUTRIN.

C’est ainsi que nous nous sommes connus.

LA DUCHESSE DE CHRISTOVAL.

Vous, général ?

INÈS.

Mon père, Monsieur !

VAUTRIN.

Eh ! Mesdames, j’étais ou pendu par lui comme un rebelle, ou l’un des héros d’une nation délivrée, et me voici ! En arrivant à l’improviste à la tête des ouvriers de ses mines, Amoagos décidait la question. Le salut de son ami le duc de Christoval a été le prix de son concours. Entre nous, l’empereur Iturbide, mon maître, n’est qu’un nom : l’avenir du Mexique est tout entier dans le parti du vieil Amoagos.

LA DUCHESSE DE CHRISTOVAL.

Quel est donc, Monsieur, cet Amoagos qui, selon vous, est l’arbitre des destinées du Mexique ?

VAUTRIN.

Vous ne le connaissez pas ici ? Vraiment non ? Je ne sais pas ce qui pourra souder l’ancien monde au nouveau ? Oh ! ce sera la vapeur. Exploitez donc des mines d’or ! soyez don Inigo, Jan Varaco Cardaval de los Amoagos, las Frescas y Peral… mais dans la kirielle de nos noms espagnols, vous le savez, nous n’en disons jamais qu’un. Je m’appelle simplement Crustamente. Enfin, soyez le futur président de la république mexicaine, et la France vous ignore. Mesdames, le vieil Amoagos a reçu là-bas M. de Christoval,