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FERDINAND.

Comment, Mademoiselle, quand madame votre belle-mère, quand monsieur votre père sont d’accord ?…

PAULINE, à Ferdinand.

Perdus.

LE GÉNÉRAL.

Ah ! je vais faire le tyran. — Dites-moi, Ferdinand, vous avez sans doute une famille honorable ?…

PAULINE, à Ferdinand.

Là !

LE GÉNÉRAL.

Votre père, bien certainement, exerçait une profession au moins égale à celle du mien, qui était sergent du guet.

GERTRUDE, à part.

Les voilà séparés à jamais.

FERDINAND.

Ah ! (À Gertrude.) Je vous comprends. (Au général.) Général, je ne dis pas que dans un rêve, oh ! bien lointain, Mademoiselle, dans un doux rêve, auquel on aime à s’abandonner quand on est pauvre et sans famille… (les rêves sont toute la fortune des malheureux !) je ne dis pas que je n’aie pas regardé comme un bonheur à rendre fou de vous appartenir ; mais l’accueil que fait mademoiselle à des espérances bien naturelles, et qu’il a été cruel à vous de ne pas laisser secrètes, est tel, que dans ce moment même, puisqu’elles sont sorties de mon cœur, elles n’y rentreront jamais ! Je suis bien éveillé, général. Le pauvre a sa fierté qu’il ne faut pas plus blesser que l’on ne doit heurter… tenez ?… votre attachement à Napoléon. (À Gertrude.) Vous jouez un rôle terrible !

GERTRUDE.

Elle épousera Godard.

LE GÉNÉRAL.

Pauvre jeune homme ? (À Pauline.) Il est très-bien ! Je l’aime… (Il prend Ferdinand à part.) À votre place, moi, à votre âge, j’aurais… Non, non, diable !… c’est ma fille !

FERDINAND.

Général, je m’adresse à votre honneur… Jurez-moi de garder le plus profond secret sur ce que je vais vous confier, et que ce secret s’étende jusqu’à madame de Grandchamp.