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DUPRÉ.

Ne prononcez pas ce mot-là, il va tout gâter !… Le monde, je le méprise !… je ne lui dois aucun compte de ma conduite, de mes affections… Depuis que j’ai vu votre courage, votre résignation… je vous aime… tâchez de m’aimer !

PAMÉLA.

Oh ! oui, oui, Monsieur.

MADAME GIRAUD.

Qui est-ce qui ne vous aimerait pas ?

GIRAUD.

Monsieur, je ne suis rien qu’un pauvre portier… et encore je ne le suis plus, portier… vous aimez notre fille, vous venez de lui dire… je vous demande pardon… j’ai des larmes plein les yeux… et ça me coupe la parole… (Il s’essuie les yeux.) Eh bien ! vous faites bien de l’aimer !… ça prouve que vous avez de l’esprit !… parce que Paméla… il y a des enfants de propriétaires qui ne la valent pas !… seulement c’est humiliant d’avoir des père et mère comme nous…

PAMÉLA.

Mon père !

GIRAUD.

Vous… le premier des hommes !… Eh bien ! moi et ma femme, nous irons nous cacher, n’est-ce pas la vieille ?… dans une campagne bien loin !… et le dimanche, à l’heure de la messe, vous direz : Ils sont tous les deux qui prient le bon Dieu pour moi… et pour leur fille…

(Paméla embrasse son père et sa mère.)
DUPRÉ.

Braves gens !… Oh ! mais ceux-là n’ont pas de titres !… pas de fortune !… Vous regrettez votre province !… eh bien ! vous y retournerez, vous y vivrez heureux, tranquilles… je me charge de tout.

GIRAUD et MADAME GIRAUD.

Oh ! notre reconnaissance…

DUPRÉ.

Encore… ce mot-là vous portera malheur ! je le biffe du dictionnaire !… En attendant, je vous emmène à la campagne avec moi !… allez… allez tout préparer.

GIRAUD.

Monsieur l’avocat ?…

DUPRÉ.

Eh bien ! quoi ?