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comme je travaille pour la maison, je suis entré ici par une bonne inspiration, pensant que vous y viendriez, et je vous guettais.

DUPRÉ.

Que me voulez-vous ?

BINET.

Je suis Joseph Binet.

DUPRÉ.

Eh bien ! après ?

BINET.

Monsieur, soit dit sans vous offenser, j’ai quatorze cents francs à moi… oh ! bien à moi ! gagnés sou à sou ; je suis ouvrier tapissier, et mon oncle Dumouchel, ancien marchand de vin, a des sonnettes.

DUPRÉ.

Parlez donc clairement ! que signifient ces préparations mystérieuses ?

BINET.

Quatorze cents francs, c’est un dénier, et on dit qu’il faut bien payer les avocats, et que c’est parce qu’on les paye bien qu’il y en a tant… J’aurais mieux fait d’être avocat, elle serait ma femme !

DUPRÉ.

Êtes-vous fou ?

BINET.

Du tout. Mes quatorze cents francs, je les ai là tenez, Monsieur, ce n’est pas une frime. ils sont à vous !

DUPRÉ.

Et comment ?

BINET.

Si vous sauvez monsieur Jules… de la mort, s’entend… et si vous obtenez de le faire déporter. Je ne veux pas sa perte ; mais il faut qu’il voyage… Il est riche, il s’amusera… Ainsi, sauvez sa tête… faites-le condamner à une simple déportation, quinze ans, par exemple, et mes quatorze cents francs sont à vous ; je vous les donnerai de bon cœur, et je vous ferai par-dessus le marché un fauteuil de cabinet… Voilà !

DUPRÉ.

Dans quel but me parlez-vous ainsi ?

BINET.

Dans quel but ? j’épouserai Paméla… j’aurai ma petite Paméla.

DUPRÉ.

Paméla !