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VAUTRIN.

Tu étais perdu. Ah ! ça ! mais tu tiens donc beaucoup à ne pas te reperdre, toi ? Tu jouis donc de la paix du cœur ici ?

JOSEPH.

Ma foi, je trouve mon compte à être honnête.

VAUTRIN.

Et entends-tu bien l’honnêteté ?

JOSEPH.

Mais, ça et mes gages, je suis content.

VAUTRIN.

Je te vois venir, mon gaillard. Tu prends peu et souvent, tu amasses, et tu auras encore l’honnêteté de prêter à la petite semaine. Eh bien tu ne saurais croire quel plaisir j’éprouve à voir une de mes vieilles connaissances arriver à. une position honorable. Tu le peux, tu n’as que des défauts, et c’est la moitié de la vertu. Moi, j’ai eu des vices, et je les regrette… comme ça passe ! Et maintenant plus rien ! il ne me reste que les dangers et la lutte. Après tout, c’est la vie d’un Indien entouré d’ennemis, et je défends mes cheveux.

JOSEPH.

Et les miens ?

VAUTRIN.

Les tiens ?… Ah ! c’est vrai. Quoi qu’il arrive ici, tu as la parole de Jacques Collin de n’être jamais compromis mais tu m’obéiras en tout !

JOSEPH.

En tout ?… cependant…

VAUTRIN.

On connaît son Code. S’il y a quelque méchante besogne, j’aurai mes fidèles, mes vieux. Es-tu depuis longtemps ici ?

JOSEPH.

Madame la duchesse m’a pris pour valet de chambre en allant à Gand, et j’ai la confiance de ces dames.

VAUTRIN.

Ça me va ! J’ai besoin de quelques notes sur les Montsorel. Que sais-tu ?

JOSEPH.

Rien.

VAUTRIN.

La confiance des grands ne va jamais plus loin. Qu’as-tu découvert ?