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— Vieux ! avec sept cent mille francs on a bien des cocardes ! disait Jacques Collin en grisant d’espoir son fanandel.

Dab ! Dab !

— J’éblouirai le ministre de la justice… Ah ! Ruffard la dansera, c’est une raille à démolir. Bibi-Lupin est frit.

— Eh bien ! c’est dit, s’écria La Pouraille avec une joie sauvage. Ordonne, j’obéis.

Et il serra Jacques Collin dans ses bras, en laissant voir des larmes de joie dans ses yeux tant il lui parut possible de sauver sa tête.

— Ce n’est pas tout, dit Jacques Collin. La Cigogne a la digestion difficile, surtout en fait de redoublement de fièvre (révélation d’un nouveau fait à charge). Maintenant il s’agit de servir de belle une largue (de dénoncer à faux une femme).

— Et comment ? À quoi bon ? demanda l’assassin.

— Aide-moi ! Tu vas voir !… répondit Trompe-la-Mort.

Jacques Collin révéla brièvement à La Pouraille le secret du crime commis à Nanterre et lui fit apercevoir la nécessité d’avoir une femme qui consentirait à jouer le rôle qu’avait rempli la Ginetta. Puis il se dirigea vers le Biffon avec La Pouraille devenu joyeux.

— Je sais combien tu aimes la Biffe… dit Jacques Collin au Biffon.

Le regard que jeta le Biffon fut tout un poème horrible.

— Que fera-t-elle pendant que tu seras au pré ?

Une larme mouilla les yeux féroces du Biffon.

— Eh bien ! si je te la fourrais à la lorcefé des largues (à la Force des femmes, les Madelonnettes ou Saint-Lazare) pour un an, le temps de ton gerbement (jugement), de ton départ, de ton arrivée et de ton évasion ?

— Tu ne peux faire de miracle, elle est nique de mèche (sans aucune complicité), répondit l’amant de la Biffe.

— Ah ! mon Biffon, dit La Pouraille, notre dab est plus puissant que le Meg !… (Dieu).

— Quel est ton mot de passe avec elle ? demanda Jacques Collin au Biffon avec l’assurance d’un maître qui ne doit pas essuyer de refus.

Sorgue à Pantin (nuit à Paris). Avec ce mot, elle sait qu’on vient de ma part, et si tu veux qu’elle t’obéisse, montre-lui