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— De ne pas m’en vouloir…

— Jamais ! Dis.

— De me pardonner et de ne jamais me parler de cela…

— Mais dis donc !…

— D’ailleurs, tous les torts sont à toi…

— Voyons !… ou je m’en vais…

— Il n’y a que toi qui puisses me faire sortir de l’embarras où je suis… et à cause de toi !…

— Mais voyons…

— Il s’agit de…

— De ?

— De Justine.

— Ne m’en parle pas, elle est renvoyée, je ne veux plus la voir, sa manière d’être expose votre réputation…

— Et que peut-on dire ? que t’a-t-on dit ?

La scène tourne, il en résulte une sous-explication qui fait rougir Caroline dès qu’elle aperçoit la portée des suppositions de ses meilleures amies, enchantées toutes de trouver des raisons bizarres à sa vertu.

— Eh bien, Adolphe, c’est toi qui me vaux tout cela ! Pourquoi ne m’as-tu rien dit de Frédéric…

— Le grand ? le roi de Prusse ?

— Voilà bien les hommes !… Tartufe, voudrais-tu me faire croire que tu aies oublié, depuis si peu de temps, ton fils, le fils de mademoiselle Suzanne Beauminet !

— Tu sais…

— Tout !… Et la mère Mahuchet, et tes sorties pour faire dîner le petit quand il a congé.

Quelquefois, l’Affaire-Chaumontel est un enfant naturel, c’est l’espèce la moins dangereuse des Affaires-Chaumontel.

— Quels chemins de taupe vous savez faire, vous autres dévotes ! s’écrie Adolphe épouvanté.

— C’est Justine qui a tout découvert.

— Ah ! je comprends maintenant la raison de ses insolences…

— Ah ! va, mon ami, ta Caroline a été bien malheureuse, et cet espionnage dont la cause est mon amour insensé pour toi, car je t’aime… à devenir folle… Non, si tu me trahissais, je m’enfuirais au bout du monde… Eh bien, cette jalousie à faux m’a mise sous la domination de Justine… Ainsi, mon chat, tire-moi de là !