tresse qu’elle est aussi femme qu’elle, sans être mariée. Elle a ses papillons noirs, ses caprices, ses tristesses. Enfin, elle ose avoir des nerfs !… Elle répond brusquement, elle est insupportable aux autres domestiques, enfin ses gages ont été considérablement augmentés.
— Ma chère, cette fille devient de jour en jour plus insupportable, dit un jour Adolphe à sa femme en s’apercevant que Justine écoute aux portes ; et, si vous ne la renvoyez pas, je la renverrai, moi !…
Caroline, épouvantée, est obligée, pendant que monsieur est dehors, de chapitrer Justine.
— Justine, vous abusez de mes bontés pour vous : vous avez ici d’excellents gages, vous avez des profits, des cadeaux : tâchez d’y rester, car monsieur veut vous renvoyer.
La femme de chambre s’humilie, elle pleure ; elle est si attachée à madame ! Ah ! elle passerait dans le feu pour elle, elle se ferait hacher ; elle est prête à tout faire.
— Vous auriez quelque chose à cacher, madame, je le prendrais sur mon compte.
— C’est bien, Justine, c’est bien, ma fille, dit Caroline effrayée ; il ne s’agit pas de cela ; sachez seulement vous tenir à votre place.
— Ah ! se dit Justine, monsieur veut me renvoyer… Attends, je m’en vais te rendre la vie dure, vieux pistolet !
Huit jours après, en coiffant sa maîtresse, Justine regarde dans la glace pour s’assurer que madame peut voir toutes les grimaces de sa physionomie ; aussi Caroline lui demande-t-elle bientôt : ─ Qu’as-tu donc, Justine ?
— Ce que j’ai, je le dirais bien à madame, mais madame est si faible avec monsieur…
— Allons, voyons, dis ?
— Je sais bien, Madame, pourquoi monsieur veut me mettre lui-même à la porte : monsieur n’a plus confiance qu’en Benoît, et Benoît fait le discret avec moi…
— Hé bien ! qu’y a-t-il ? A-t-on surpris quelque chose ?
— Je suis sûre qu’à eux deux ils manigancent quelque chose contre madame, répond la femme de chambre avec autorité.
Caroline, que Justine observe dans la glace, est devenue pâle ; toutes les tortures de la petite misère précédente reviennent, et Justine se voit devenue nécessaire autant que les espions le sont au gouvernement quand on découvre une conspiration. Cependant