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Quelques-uns hasardent des surnoms d’une décence douteuse, tels que : — Mon bichon, — ma niniche, — Tronquette !

Nous avons entendu un de nos hommes politiques le plus remarquable par sa laideur appelant sa femme : ─ Moumoutte !

— J’aimerais mieux, disait à sa voisine cette infortunée, qu’il me donnât un soufflet.

— Pauvre petite femme, elle est bien malheureuse ! reprit la voisine en me regardant quand Moumoutte fut partie ; lorsqu’elle est dans le monde avec son mari, elle est sur les épines, elle le fuit. Un soir, ne l’a-t-il pas prise par le cou en lui disant : ─ Allons, viens, ma grosse !

On prétend que la cause d’un très-célèbre empoisonnement d’un mari par l’arsenic, provenait des indiscrétions continuelles que subissait la femme dans le monde. Ce mari donnait de légères tapes sur les épaules de cette femme conquise à la pointe du Code, il la surprenait par un baiser retentissant, il la déshonorait par une tendresse publique assaisonnée de ces fatuités grossières dont le secret appartient à ces sauvages de France, vivant au fond des campagnes, et dont les mœurs sont encore peu connues malgré les efforts des naturalistes du roman.

Ce fut, dit-on, cette situation choquante qui, bien appréciée par des jurés pleins d’esprit, valut à l’accusée un verdict adouci par les circonstances atténuantes.

Les jurés se dirent :

— Punir de mort ces délits conjugaux, c’est aller un peu loin ; mais une femme est très-excusable quand elle est si molestée !…

Nous regrettons infiniment, dans l’intérêt des mœurs élégantes, que ces raisons ne soient pas généralement connues. Aussi Dieu veuille que notre livre ait un immense succès, les femmes y gagneront d’être traitées comme elles doivent l’être, en reines.

En ceci, l’amour est bien supérieur au mariage, il est fier des indiscrétions, certaines femmes les quêtent, les préparent, et malheur à l’homme qui ne s’en permet pas quelques-unes !

Combien de passion dans un tu égaré !

J’ai entendu, c’était en province, un mari qui nommait sa femme : ─ Ma berline… Elle en était heureuse, elle n’y voyait rien de ridicule ; elle l’appelait ─ son fiston !… Aussi ce délicieux couple ignorait-il qu’il existât des petites misères.