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La belle-mère d’Adolphe vient voir sa fille. Caroline dit : « Le salon de monsieur ! ─ La chambre de monsieur ! » Tout, chez elle, est à monsieur.

— Ah çà ! qu’y a-t-il donc, mes enfants ? demande la belle-mère ; on dirait que vous êtes tous les deux à couteaux tirés ?

— Eh ! mon Dieu, dit Adolphe, il y a que Caroline a eu le gouvernement de la maison et n’a pas su s’en tirer.

— Elle a fait des dettes ?…

— Oui, ma chère maman.

— Écoutez, Adolphe, dit la belle-mère après avoir attendu que sa fille l’ait laissée seule avec son gendre, aimeriez-vous mieux que ma fille fût admirablement bien mise, que tout allât à merveille chez vous, et qu’il ne vous en coûtât rien ?…

Essayez de vous représenter la physionomie d’Adolphe en entendant cette déclaration des droits de la femme !


Caroline passe d’une toilette misérable à une toilette splendide. Elle est chez les Deschars : tout le monde la félicite sur son goût, sur la richesse de ses étoffes, sur ses dentelles, sur ses bijoux.

— Ah ! vous avez un mari charmant !… dit madame Deschars.

Adolphe se rengorge et regarde Caroline.

— Mon mari, madame !… je ne coûte, Dieu merci, rien à monsieur ! Tout cela me vient de ma mère.

Adolphe se retourne brusquement, et va causer avec madame de Fischtaminel.


Après un an de gouvernement absolu, Caroline adoucie dit un matin :

— Mon ami, combien as-tu dépensé cette année ?…

— Je ne sais pas.

— Fais tes comptes.

Adolphe trouve un tiers de plus que dans la plus mauvaise année de Caroline.

— Et je ne t’ai rien coûté pour ma toilette, dit-elle.


Caroline joue les mélodies de Schubert. Adolphe éprouve une