elle. Je sais bien qu’il y a des colléges, mais on ne met pas des garçons au collége à six ans, et Charles n’ira pas au collége.
— Mais, ma chère amie, ne t’emporte pas.
— Comme si je m’emportais jamais ! Je suis femme et sais souffrir.
— Raisonnons.
— Oui, c’est assez déraisonner.
— Il est bien temps d’apprendre à lire et à écrire à Charles ; plus tard, il éprouverait des difficultés qui le rebuteraient.
Ici, vous parlez pendant dix minutes sans aucune interruption, et vous finissez par un : ─ Eh bien ? armé d’une accentuation qui figure un point interrogeant extrêmement crochu.
— Eh bien ! dit-elle, il n’est pas encore temps de mettre Charles au collége.
Il n’y a rien de gagné.
— Mais, ma chère, cependant monsieur Deschars a mis son petit Jules au collége à six ans. Viens voir des colléges, tu y trouveras énormément d’enfants de six ans.
Vous parlez encore dix minutes sans aucune interruption, et quand vous jetez un autre :
─ Eh bien ?
— Le petit Deschars est revenu avec des engelures, répond-elle.
— Mais Charles a des engelures ici.
— Jamais, dit-elle d’un air superbe.
La question se trouve, après un quart d’heure, arrêtée par une discussion accessoire sur : « Charles a-t-il eu ou n’a-t-il pas eu des engelures ? »
Vous vous renvoyez des allégations contradictoires, vous ne vous croyez plus l’un l’autre, il faut en appeler à des tiers.
Tout ménage a sa cour de cassation qui ne s’occupe jamais du fond et qui ne juge que la forme.
La bonne est mandée, elle vient, elle est pour votre femme. Il est acquis à la discussion que Charles n’a jamais eu d’engelures.
Caroline vous regarde, elle triomphe et vous dit ces ébouriffantes paroles : ─ Tu vois bien qu’il est impossible de mettre Charles au collége.
Vous sortez suffoqué de colère. Il n’y a aucun moyen de prouver à cette femme qu’il n’existe pas la moindre corrélation entre la