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— Comme il entend son affaire, dit Courtecuisse, il a descendu le long du perron, prend(s) par Blangy et la route, c’est le plus sûr…..

— Oui, dit Tonsard, mais il amènera monsieur Gourdon.

— Il ne le trouvera peut-être pas, dit Courtecuisse ; il vient d’aller à Couches, pour la bourgeoise de la poste, qui fait le monde à cette heure.

— Et c’est sûr, dit Vaudoyer, il aime assez sa femme pour ça.

— Mais alors, il ira par la grand’route, de Soulanges à Couches, c’est le plus court.

— Et c’est le plus sûr pour nous, dit Courtecuisse, il fait un joli clair de lune, sur la grand’route il n’y a pas de garde comme dans les bois, on entend de loin, et des pavillons, là, derrière les haies, à l’endroit où elles joignent le petit bois, on peut tirer un homme par derrière comme un lapin, à cinq pas…..

— Il sera onze heures et demie quand il passera là, dit Tonsard, il va mettre une demi-heure pour aller à Soulanges, et autant pour revenir là. Ah çà, mes enfants, si monsieur Gourdon était sur la route…

— Ne t’inquiète pas, dit Courtecuisse, moi je serai à dix minutes de toi, sur la route au droit de Blangy, tirant sur Soulanges, Vaudoyer sera à dix minutes de toi, tirant sur Couches, et s’il vient quelqu’un, une voiture de poste, la malle, les gendarmes, enfin qui que ce soit, nous tirons un coup en terre, un coup étouffé.

— Et si je le manque…

— Il a raison, dit Courtecuisse ; je suis meilleur tireur que toi, Vaudoyer, j’irai avec toi, Bonnébault me remplacera, il jettera un cri, ça s’entendra mieux et c’est moins suspect.

Tous trois rentrèrent, la noce continua ; seulement à onze heures, Vaudoyer, Courtecuisse, Tonsard et Bonnébault sortirent avec leurs fusils sans qu’aucune des femmes y fît attention. Ils revinrent d’ailleurs trois quarts d’heure après, et se remirent à boire jusqu’à une heure du matin. Les deux filles Tonsard, leur mère et la Bonnébault avaient tant fait boire le meunier, les manouvriers et les deux paysans, ainsi que le père de la Tonsard, qu’ils étaient couchés par terre, et ronflaient quand les quatre convives partirent ; et à leur retour, on secoua les dormeurs, qu’ils retrouvèrent chacun à sa place.

Pendant que cette orgie allait son train, le ménage de Michaud