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d’une étendue d’environ trente hectares, au bout duquel les moulins de Soulanges, établis sur de nombreux îlots, dessinent une fabrique aussi gracieuse que pourrait l’inventer un architecte de jardins. Après avoir arrosé le parc de Soulanges, où elle alimente de belles rivières et des lacs artificiels, la Thune se jette dans l’Avonne par un canal magnifique.

Le château de Soulanges, rebâti sous Louis XIV, sur les dessins de Mansard, et l’un des plus beaux de la Bourgogne, fait face à la ville. Ainsi Soulanges et le château se présentent respectivement un point de vue aussi splendide qu’élégant. La route cantonale tourne entre la ville et l’étang, un peu trop pompeusement nommé le lac de Soulanges par les gens du pays.

Cette petite ville est une de ces compositions naturelles excessivement rares en France, où le joli, dans ce genre, manque absolument. Là, vous retrouvez en effet le joli de la Suisse, comme le disait Blondet dans sa lettre, le joli des environs de Neuchâtel. Les gais vignobles qui forment une ceinture à Soulanges complètent cette ressemblance, hormis le Jura et les Alpes, toutefois ; les rues, superposées les unes aux autres sur la colline, ont peu de maisons, car elles sont toutes accompagnées de jardins, qui produisent ces masses de verdure si rares dans les capitales. Les toitures bleues ou rouges, mélangées de fleurs, d’arbres, de terrasses à treillages, offrent des aspects variés et pleins d’harmonie.

L’église, une vieille église du moyen-âge, bâtie en pierres, grâce à la munificence des seigneurs de Soulanges, qui s’y sont réservé d’abord une chapelle près du chœur, puis une chapelle souterraine, leur nécropole, offre, comme celle de Longjumeau, pour portail, une immense arcade, frangée de cercles fleuris et garnis de statuettes, flanquée de deux piliers à niches terminés en aiguilles. Cette porte, assez souvent répétée dans les petites églises du moyen-âge que le hasard a préservées des ravages du calvinisme, est couronnée par un triglyphe au-dessus duquel s’élève une Vierge sculptée tenant l’Enfant-Jésus. Les bas côtés se composent à l’extérieur de cinq arcades pleines dessinées par des nervures, éclairées par des fenêtres à vitraux. Le chevet s’appuie sur des arcs-boutants dignes d’une cathédrale. Le clocher, qui se trouve dans une branche de la croix, est une tour carrée surmontée d’une campanille. Cette église s’aperçoit de loin, car elle est en haut de la grande place au bas de laquelle passe la route.