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les maisons de l’ancien Bénédictin et du jeune prêtre adhéraient à l’église, aussi bien divisés que réunis par elle ; mais encore ils se surveillaient l’un l’autre, et le village entier espionnait l’abbé Brossette. Le grande rue, qui commençait à la Thune, montait tortueusement jusqu’à l’église. Des vignobles et des jardins de paysans, un petit bois couronnaient la butte de Blangy.

La maison de Rigou, la plus belle du village, était bâtie en gros cailloux particuliers à la Bourgogne, pris dans un mortier jaune lissé carrément dans toute la largeur de la truelle, ce qui produit des ondes percées çà et là, par les faces assez généralement noires de ce caillou. Une bande de mortier où pas un silex ne faisait tache, dessinait, à chaque fenêtre, un encadrement que le temps avait rayé par des fissures fines et capricieuses, comme on en voit dans les vieux plafonds. Les volets, grossièrement faits, se recommandaient par une solide peinture vert-dragon. Quelques mousses plates soudaient les ardoises sur le toit. C’est le type des maisons bourguignonnes, les voyageurs en aperçoivent par milliers de semblables en traversant cette portion de la France.

Une porte bâtarde ouvrait sur un corridor, partagé par la cage d’un escalier de bois. A l’entrée, on voyait la porte d’une vaste salle à trois croisées donnant sur la place. La cuisine adossée à l’escalier, tirait son jour de la cour, cailloutée avec soin, et où l’on entrait par une porte cochère. Tel était le rez-de-chaussée. Le premier étage contenait trois chambres, et au-dessus une petite chambre en mansarde. Un bûcher, une remise, une écurie attenaient à la cuisine et faisaient un retour d’équerre. Au-dessus de ces constructions légères, on avait ménagé des greniers, un fruitier et une chambre de domestique. Une basse-cour, une étable, des toits à porc faisaient face à la maison. Le jardin d’environ un arpent et clos de murs, était un jardin de curé, c’est-à-dire plein d’espaliers, d’arbres à fruit, de treilles, aux allées sablées et bordées de quenouilles, à carrés de légumes fumés avec le fumier provenant de l’écurie. Au-dessus de la maison, attenait un second clos, planté d’arbres, enclos de haies, et assez considérable pour que deux vaches y trouvassent leur pâture en tout temps.