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N’imprimons-nous pas nos mœurs, notre pensée, sur tout ce qui nous entoure et nous appartient ? « Parle, marche, mange ou habille-toi, et je te dirai qui tu es, » a remplacé l’ancien proverbe, expression de cour, adage de privilégié. Aujourd’hui, un maréchal de Richelieu est impossible. Un pair de France, un prince même, risque de tomber au-dessous d’un électeur à cent écus, s’il se déconsidère : car il n’est permis à personne d’être impertinent ou débauché. Plus les choses ont subi l’influence de la pensée, plus les détails de la vie se sont ennoblis, épurés, agrandis.

Telle est la pente insensible par laquelle le christianisme de notre révolution a renversé le polythéisme de la féodalité, par quelle filiation un sentiment vrai a respiré jusque dans les signes matériels et changeants de notre puissance. Et voilà comment nous sommes revenus au point d’où nous sommes partis : — à l’adoration du veau d’or. Seulement, l’idole parle, marche, pense, en un mot, elle est un géant. Aussi le pauvre Jacques Bonhomme est-il bâté pour longtemps. Une révolution populaire est impossible aujourd’hui. Si quelques rois tombent encore, ce sera, comme en France, par le froid mépris de la classe intelligente.

Pour distinguer notre vie par de l’élégance, il ne suffit donc plus aujourd’hui d’être noble