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tion constante de notre supériorité devra subir l’influence de cette haute philosophie et participera bien moins de la matière que de l’âme.

Hier encore, les Francs sans armures, peuple débile et dégénéré, continuaient les rites d’une religion morte et levaient les étendards d’une puissance évanouie. Maintenant, chaque homme qui va se dresser s’appuiera sur sa propre force. Les oisifs ne seront plus des fétiches, mais de véritables dieux. Alors, l’expression de notre fortune résultera de son emploi, et la preuve de notre élévation individuelle se trouvera dans l’ensemble de notre vie ; car princes et peuples comprennent que le signe le plus énergique ne suppléera plus le pouvoir. Ainsi, pour chercher à rendre un système par une image, il ne


    rendre un jour tous millionnaires ?… Nous ne le pensons pas. Malgré, le succès de M. Jacotot, c’est une erreur de croire les intelligences égales : elles ne peuvent l’être que par une similitude de force, d’exercice ou de perfection impossible à rencontrer dans les organes : car, chez les hommes civilisés surtout, il serait difficile de rassembler deux organisations homogènes. Ce fait immense prouve que Sterne avait peut-être raison de mettre l’art d’accoucher en avant de toutes les sciences et des philosophies. Alors, les hommes resteront donc toujours les uns pauvres, les autres riches ; seulement, les intelligences supérieures étant dans une voie de progrès, le bien-être de la masse augmentera, comme le démontre l’histoire de la civilisation depuis le XVIe siècle, moment où la pensée a triomphé, en Europe, par l’influence de Bacon, de Descartes et de Bayle. (Note de l’Auteur.)