Page:Balzac- Traité de la vie élégante - 1922.djvu/189

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
187
DE LA DÉMARCHE

toute chose, le beau se sent et ne se définit pas.

Une belle démarche, des manières douces, un parler gracieux, séduisent toujours et donnent à un homme médiocre d’immenses avantages sur un homme supérieur. Le bonheur est un grand sot, peut-être ! Le talent comporte en toute chose d’excessifs mouvements qui déplaisent, et un prodigieux abus d’intelligence qui détermine une vie d’exception. L’abus soit du corps, soit de la tête, éternelles plaies des sociétés, cause ces originalités physiques, ces déviations, dont nous allons nous moquant sans cesse. La paresse du Turc, assis sur le Bosphore et fumant sa pipe, est sans doute une grande sagesse. Fontenelle, ce beau génie de la vitalité, qui devina les petits dosages du mouvement, l’homœopathie de la démarche, était essentiellement Asiatique.

— Pour être heureux, a-t-il dit, il faut tenir peu d’espace, et peu changer de place.

Donc, la pensée est la puissance qui corrompt notre mouvement, qui nous tord le corps, qui le fait éclater sous ses despotiques efforts. Elle est le grand dissolvant de l’espèce humaine.

Rousseau l’a dit, Gœthe l’a dramatisé dans Faust, Byron l’a poétisé dans Manfred. Avant eux, l’Esprit-Saint s’est prophétiquement écrié