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vère ? et ne savons-nous pas tous deux, par une cruelle expérience, que les plus nobles choses et les plus resplendissantes sont aussi les plus promptes à descendre et à s’éteindre dans l’éternelle nuit.


CHAPITRE XV

MARIE-GASTON À LA COMTESSE DE L’ESTORADE


Arcis-sur-Aube, 13 mai 1839.
Madame,

La fièvre électorale vous a gagnée aussi, et vous voulez bien vous charger de nous faire passer de la part de monsieur de l’Estorade un certain nombre de découragements qui, à coup sûr, méritent d’être pris en considération. Je dois le dire, cependant : ces confidences ne me paraissent pas avoir toute la portée que l’on pourrait croire, et, même avant votre officieux avis, les difficultés de notre situation n’avaient pas manqué de nous être révélées.

Nous savions la mission de haute confiance dont s’est chargé monsieur Maxime de Trailles, mission que pendant quelques jours il a assez malheureusement essayé de dissimuler sous le semblant d’un intérêt industriel. Nous savions même, et vous, madame, semblez l’ignorer, que cet habile agent de la pensée ministérielle a trouvé le moyen de combiner avec les soins de la politique générale ceux de sa politique particulière.

Monsieur Maxime de Trailles, si nous sommes bien informés, aurait été récemment sur le point de succomber à un dernier et redoutable accès de la maladie chronique dont il est affligé depuis longtemps. Cette maladie, c’est sa dette, car on ne dit pas les dettes, on dit la dette de monsieur de Trailles, comme on dit la dette de l’Angleterre. Dans cette extrémité, ce gentilhomme, décidé aux remèdes les plus désespérés, se serait arrêté à la ressource d’un mariage qu’on pourrait bien qualifier de mariage in extremis, puisque ledit