en son nom ou qu’il les trouvait d’une certaine prolixité.
Je ne sais si l’amour-propre d’orateur offensé donna à Jacques Bricheteau ce mouvement de vivacité ; mais, se levant avec impatience, il secoua rudement le bras du dormeur en lui criant :
— Eh ! marquis, si vous dormez ainsi au conseil des ministres, voilà, sur ma parole, un pays bien gouverné ?
Monsieur de Sallenauve ouvrit les yeux, se secoua, puis s’adressant à moi :
— Pardon, monsieur le comte, me dit-il, mais voilà dix nuits que je voyage en poste, sans m’arrêter, afin de me trouver au rendez-vous que je vous avais fait donner ici ; quoique j’aie passé dans un lit, la nuit dernière, je me sens encore un peu fatigué.
Cela dit, il se leva, aspira une forte prise de tabac, et se mit à se promener dans l’appartement pendant que Jacques Bricheteau continuait ainsi :
— Il y a un peu plus d’un an, je reçois enfin une lettre de votre père ; il m’expliquait son long silence, les projets qu’il avait sur vous, et la nécessité où, encore pour quelques années peut-être, il était de garder avec vous le plus sévère incognito. C’est justement à cette époque que le hasard vous conduit sur mon chemin ; alors je vous vois prêt à vous jeter dans les folies pour pénétrer un secret dont l’existence était devenue manifeste pour vous.
— Vous êtes preste à déménager, dis-je en riant à l’ex-habitant du quai de Béthune.
— Je fis mieux que cela : horriblement tourmenté de l’idée qu’au moment précis où monsieur le marquis en déclarait la continuation nécessaire, vous viendriez à pénétrer malgré moi les ténèbres dont je vous avais si savamment environné…
— Vous partîtes pour Stockholm ?
— Non : pour la résidence de votre père, et à Stockholm je mis à la poste la lettre dont il m’avait chargé pour vous.
— Mais je ne saisis pas bien…
— Rien pourtant n’est plus facile à comprendre, dit le