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le défilé de ses idées politiques qui sera une curiosité !

— Il est républicain, puisqu’il est l’ami de messieurs du National et qu’il ressemble à Danton.

— Sans doute, mais il méprise souverainement ses coreligionnaires, disant qu’ils ne sont bons qu’au coup de main, à la violence et à faire la grosse voix. Provisoirement, donc, il s’arrangerait d’une monarchie entourée d’institutions républicaines, mais il prétend que notre royauté citoyenne doit infailliblement se perdre par l’abus des influences, qu’il appelle brutalement la corruption. Ceci le mènerait alors à se rapprocher de la petite Église du centre gauche ; mais là encore, car il y a toujours des mais, il ne voit qu’une réunion d’ambitieux et d’eunuques, aplanissant à leur insu le chemin à une révolution que, pour son compte, il voit poindre à l’horizon avec le plus grand regret, parce que, dit-il, les masses sont trop peu préparées et trop peu intelligentes pour ne la point laisser échapper de leurs mains. La légitimité, il en rit ; il n’admet d’aucune façon qu’elle soit un principe. Pour lui, c’est tout simplement une forme plus arrêtée et plus parfaite de l’hérédité monarchique, et il ne lui reconnaît pas d’autre supériorité que celle du vin vieux sur le vin nouveau. En même temps qu’il n’est pas légitimiste, pas conservateur, pas centre gauche, et qu’il est républicain sans vouloir de la république, il se pose intrépidement en catholique, et il chevauche sur le dada de ce parti, la liberté d’enseignement ; mais cet homme, qui veut l’enseignement libre, a peur, d’autre côté, des jésuites, et il en est encore, comme en 1829, aux empiétements du parti prêtre et de la congrégation. Savez-vous enfin, le grand parti qu’il se propose de créer dans la Chambre, et dont il entend bien être le chef ? Celui du juste, de l’impartial, de l’honnête ; comme si rien de pareil pouvait se rencontrer dans la caverne et dans la popote parlementaires, et comme si, d’ailleurs, toutes les opinions, pour dissimuler leurs laides nullités, n’avaient pas de temps immémorial accaparé ce drapeau.

— De telle sorte, demanda Joseph Bridau, qu’il renonce absolument à la sculpture ?