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Beauvisage est la plus grande fortune d’Arcis, madame Marion en est la femme la plus considérée ; car, à l’exception de la femme de notre président, qui ne voit personne, elle est la seule qui sache tenir un salon ; elle est la reine d’Arcis. Madame Beauvisage paraît vouloir mettre de la politesse à son refus, voilà tout.

— Il me semble que le vieux Grévin s’est moqué de votre tante, mon cher, dit Frédéric Marest.

— Vous avez attaqué hier le comte de Gondreville, vous l’avez blessé, vous l’avez grièvement offensé, car Achille Pigoult l’a vaillamment défendu… et on veut le consulter sur votre mariage avec Cécile !…

— Il est impossible d’être plus narquois que le vieux père Grévin, dit Vinet.

— Madame Beauvisage est ambitieuse, répondit Goulard, et sait très-bien que sa fille aura deux millions ; elle veut être la belle-mère d’un ministre ou d’un ambassadeur, afin de trôner à Paris.

— Eh bien ! pourquoi pas ? dit Simon Giguet.

— Je te le souhaite, répondit le sous-préfet en regardant le substitut avec lequel il se mit à rire quand ils furent à quelques pas. Il ne sera pas seulement député ! dit-il à Olivier, le ministère a des intentions. Vous trouverez chez vous une lettre de votre père qui vous enjoint de vous assurer des personnes de votre ressort, dont les votes appartiennent au ministère, il y va de votre avancement, et il vous recommande la plus entière discrétion.

— Et pour qui devront voter nos huissiers, nos avoués, nos juges de paix, nos notaires ! fit le substitut.

— Pour le candidat que je vous nommerai…

— Mais comment savez-vous que mon père m’écrit, et ce qu’il m’écrit ?…

— Par l’inconnu…

— L’homme des mines !

— Mon cher Vinet, nous ne devons pas le connaître, traitons-le comme un étranger… Il a vu votre père à Provins, en y passant. Tout à l’heure, ce personnage m’a salué par un mot du préfet qui me dit de suivre, pour les élec-