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voiture de Chinon. En prenant ma place, je vis, sur la banquette de derrière deux gendarmes, entre lesquels était un gars d’environ vingt-deux ans.

— Qu’a-t-il donc fait celui-là ?… dis-je au brigadier, croyant qu’il s’agissait de quelque délit forestier ou autre.

— Presque rien… répondit le gendarme ; il s’est permis de rompre avec une barre de fer l’échine de son maître, et il l’a tué, pas plus tard qu’hier…

Là-dessus, grand silence. Je voyageais en compagnie d’un assassin. Celui-ci se tenait coi dans la carriole, regardant avec assez d’insouciance les arbres du chemin, qui fuyaient avec autant de rapidité que sa vie promise à l’échafaud. Il avait une figure douce, quoique brune et fortement colorée.

— Pourquoi donc a-t-il assommé son maître ?… dis-je au brigadier.

— Pour une misère… répondit le gendarme. En allant à la foire de Tours, son bourgeois, qui était un fort métayer, avait promis de rapporter les cadeaux