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arrêté. Si mon père s’était réveillé, il lui aurait brûlé la cervelle… Je l’aimais… — c’est tout vous dire.

Elle baissa les yeux et soupira. J’ai souvent entendu les sons creux qui sortent de la poitrine des agonisans ; mais j’avoue que ce soupir de femmes, ce repentir poignant, mêlé de résignation, cette terreur produite par un moment de plaisir, dont le souvenir semblait briller dans les yeux de la jeune Marseillaise, m’ont pour ainsi dire aguerri tout à coup aux expressions les plus vives de la souffrance. Il y a des jours où j’entends encore ce soupir, et il me donne toujours une sensation de froid intérieur, lorsque ma mémoire est fidèle.

— Dans trois jours, reprit-elle en levant les yeux sur moi, mon mari revient d’Allemagne. Il me sera impossible de lui cacher l’état dans lequel je suis, et il me tuera, monsieur ; il n’hésitera même pas. Mon cousin se brûlera la cervelle ou provoquera mon mari. Je suis dans l’enfer…

Elle dit cette phrase avec un calme effrayant.

— Adolphe est tenu fort sévèrement ; son père