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— Je ne me lasse pas de te voir, reprit Spellie, et je te surveillerai de plus près. »

Pauvre Muirland ! les beaux yeux de sa femme ne lui laissaient pas de repos ; c’étaient, comme disent les poètes, des astres éternellement allumés pour l’éblouir. On fit dans le canton plus de trente ballades adressées aux beaux yeux de Spellie. Quant à Muirland, un beau jour il disparut. Trois mois s’étaient écoulés ; le supplice qu’avait éprouvé le fermier avait épuisé sa vie, dévoré son sang ; il lui semblait que ce regard de feu le brûlait. S’il revenait des champs, s’il restait à la maison, s’il allait à l’église, toujours ce rayon terrible dont la présence et l’éclat pénétraient jusqu’au fond de son être et le faisaient tressaillir d’horreur. Il finit par détester le soleil, par fuir le jour.

Le même supplice que la pauvre Tuilzie avait souffert était devenu le sien ; au lieu de l’inquiétude morale qui, pendant son premier mariage, l’avait transformé en bourreau de la jeune fille, et que les hommes appellent du nom de jalousie, il se trouvait placé sous l’inquisition physique et inéluctable d’un œil qui ne se fermait jamais : c’était encore la jalousie,