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« Ballanche est une des plus puissantes intelligences comme un des plus grands écrivains de tous les âges. Voilà tout. » Nodier pensait bien. Cependant, ce publiciste, à qui l’on reconnaît volontiers de l’esprit, n’eut pas l’esprit prophétique en ajoutant que l’inspiration de Ballanche était une inspiration orphéique, destinée, comme celles de ce genre, à tomber à la merci des bacchantes. Les bacchantes ne symbolisent-elles pas ici les partis ? Ce serait dire que la Vérité, qui se tient au-dessus des partis, peut souffrir dans son intégrité par nos discussions d’intérêts. Seule, la renommée de Ballanche, qui n’aimait pas « à rester longtemps sur le terrain fangeux que se disputent les factions », devait être, un moment, obscurcie ou laissée au culte trop discret des enthousiastes. Mais le nombre des esprits méditatifs s’étant accru, l’heure d’une demi-publicité a cessé.

Le choix de pensées et fragments que nous éditons aujourd’hui tout en contenant, en substance, le système de celui que Chateaubriand envia, n’a pas la prétention de résumer la doctrine de ce penseur trop méconnu. Ce n’est qu’une introduction à la lecture des œuvres de ce philosophe qui eut une influence si puissante, quoique sourde, sur son siècle.

Quels sont, en général, les titres de Ballanche à notre admiration ; Guillemon qui résuma la pensée de l’auteur d’Antigone, dans un Épilogue à Antigone et l’Homme sans Nom nous le dit : « Il a ressaisi la chaîne dorée par laquelle l’École d’Alexandrie prétendit unir les traditions antiques aux doctrines philosophiques ; mais plus heureux que les Alexandrins, poètes et philosophes, il marche éclairé par le flambeau du christianisme et visite avec assurance les lieux infréquentés de la foule, où est le berceau mystérieux des destinées humaines. »

On le voit : lire Ballanche, ce n’est pas assez, il faut