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REINE D’ARBIEUX

de Reine après le déjeuner, la trouva couchée sur son lit, les volets mi-clos.

— J’avais la migraine.

Clémence eut l’impression que quelque chose de grave s’était passé. Mais elle connaissait trop la nature repliée de son amie pour l’interroger. Reine l’aimait sans doute plus qu’aucune autre personne de son entourage ; néanmoins le goût du rêve et du silence en elle était si profond, la vie si secrète, que la plus chère amitié même ne pouvait rien lire que sur son visage.

— Reine, dit Clémence sans la regarder, j’ai reçu une lettre de Régis. Il me demande de tes nouvelles. N’aurais-tu pas eu la carte qu’il t’a envoyée ?

— Je ne sais pas. Je ne me souviens plus… Pourquoi me parles-tu de Régis ? demanda vive­ment Reine, après un silence ; et elle tourna la tête vers le mur.

— Je n’avais pas à lui répondre, continua-t-elle, après un moment, d’un ton qu’elle voulait rendre indifférent.

La carte de Régis l’avait blessée. Quelques lignes banales, voilà ce qu’elle recevait après lui avoir donné tout son cœur. Si son ami­tié n’était que cela, elle préférait y renoncer. L’idée de lui écrire dans les mêmes termes for­cément vagues l’avait poussée au silence et à la rupture.

Clémence s’était assise sur une chaise basse. Elle réfléchissait. Si Reine s’était emportée quand elle avait prononcé le nom de Régis, c’était donc